mardi 08 mai 2007
A bicyclette !

Ah! la bicyclette, le vélo pour parler plus simplement... Ci-contre,
premier tour de France en 1903, Maurice Garin court en veston, comme
beaucoup de ses collègues et rivaux, certains arborant même fièrement un
canotier.
Un demi-siècle plus tard, j'avais 6 ans, j'ai eu la chance
d'enfourcher ma première bicyclette, rouge et rutilante. Ce fut le début
d'une grande aventure, personnelle, soit, mais réelle, qui m'amena, une
dizaine d'années plus tard, à "avaler" 100 km en trois heures, sur un
"demi-course".
Je n'ai jamais porté de veste ou de veston
pour rouler, mais une tenue de tous les jours, avec pinces à vélo,
semblait en parfaite adéquation avec ce genre d'activité.
Maintenant, plus d'un siècle après ce premier tour de France, la vie m'a
éloigné de ces premières amours, mais je n'ai jamais cessé de regarder
autour de moi.
Et ce que je vois de nos jours m'abasourdit. Le
moindre amateur de bicyclette a besoin d'un Cuissard, d'un maillot, d'un
sous-maillot, de jambières, d'un débardeur, de chaussettes, d'un
corsair, de chaussures tout cela "special cycliste", bien entendu, d'un
casque aérodynamique, aux découpes futuristes, d'un couvre-selle,
d'apport énergétique, d'aliments spécifiques, sans oublier lunettes et
bidon, avant même d'aligner les premiers kilomètres. Tous calculs faits,
un équipement juste "décent" vous coûtera 500 euros.
Quant
à la bicyclette elle-même, 18 vitesses (voire 30...) ne sont pas de
trop, quand un Garin grimpait le mont Ventoux sans le moindre
dérailleur...
Il me semble que le surnom de "petite reine" n'a
jamais mieux convenu que maintenant quand on voit qu'un vélo "standard"
pour amateur se paye couramment entre 1000 et 3500 Euros! Bien entendu,
tout amateur qui se respecte visera le cadre carbone (3000 euros), et
les roues carbone (1200 euros pièce) pour la sensation de légèreté
maximum... On passe alors dans la gamme au-dessus, où il faut composer
son vélo pièce par pièce, et alors les 8 à 10000 euros sont vite atteints.
Bien
entendu, je ne parlerai qu'à peine de ces amateurs qui, pour aller
acheter des cale-pieds, n'hésitent pas à emporter avec eux un peson ou
une balance de ménage pour être sûrs d'acheter les plus légers...
J'ai eu le culot, devrai-je plutôt dire l'impudence, de poser des
questions à ce sujet à un de ces modernes "découvreurs" du sport
cycliste. Je ne me suis pas fait insulter, non, mais les réponses qui
m'ont été données m'ont relégué au rang des premiers dinosaures.
Et
pourtant, j'ai fait du vélo, je partais le dimanche de chez mes parents,
pour une randonnée de quatre ou cinq heures, tantôt tout seul, tantôt
avec quelques copains, tous en tenue de tous les jours, et nous avions
du bon temps à revendre. Pas de compétition, ou si peu... Simplement de
bons moments partagés, des souvenirs qui se forgeaient sous nos yeux,
l'apprentissage de l'entr'aide amicale, sans casque ou cuissard.
Apparemment,
maintenant, sous des dehors super-amicaux, rien ne peut exister sans une
rivalité ou de réussite, ou d'équipement. Là où j'ai été habitué à
chercher le plaisir, il est de bon ton maintenant de chercher la
compétition.
Je suis décidément stupide et d'un autre âge...

lundi 16 avril 2007
Foute-balle

Je hais le football. J'ai jamais aimé ça, et je crois que je mourrai
avant d'avoir changé.
Pierre Desproges, que je cite ci-après, a
exprimé ça bien mieux que je ne le pourrais :
16 juin 1986
Voici bientôt quatre longues semaines que les gens normaux, j'entends les gens issus de la norme, avec deux bras et deux jambes pour signifier qu'ils existent, subissent à longueur d'antenne les dégradantes contorsions manchotes des hordes encaleçonnées sudoripares qui se disputent sur gazon l'honneur minuscule d'être champions de la balle au pied.
Voilà bien la différence entre le singe et le footballeur. Le premier a trop de mains ou pas assez de pieds pour s'abaisser à jouer au football.
Le football. Quel sport est plus laid, plus balourd et moins gracieux que le football ? Quelle harmonie, quelle élégance l'esthète de base pourrait-il bien découvrir dans les trottinements patauds de vingt-deux handicapés velus qui poussent des balles comme on pousse un étron, en ahanant des râles vulgaires de boeufs éteints ?
Quel bâtard en rut de quel corniaud branlé oserait manifester publiquement sa libido en s'enlaçant frénétiquement comme ils le font par paquets de huit, à grands coups de pattes grasses et mouillées, en ululant des gutturalités simiesques à choquer un rocker d'usine ? Quelle brute glacée, quel monstre décérébré de quel ordre noir oserait rire sur des cadavres comme nous le vîmes en vérité, certain soir du Heysel où vos idoles, calamiteux goalistes extatiques, ont exulté de joie folle au milieu de quarante morts piétinés, tout ça parce que la baballe était dans les bois ?
Je vous hais, footballeurs. Vous ne m'avez fait vibrer qu'une fois : le jour où j'ai appris que vous aviez attrapé la chiasse mexicaine en suçant des frites aztèques. J'eusse aimé que les amibes vous coupassent les pattes jusqu'à la fin du tournoi. Mais Dieu n'a pas voulu. Ça ne m'a pas surpris de sa part. Il est des vôtres. Il est comme vous. Il est partout, tout le temps, quoi qu'on fasse et où qu'on se planque, on ne peut y échapper.
Quand j'étais petit garçon, je me suis cru longtemps anormal parce que je vous repoussais déjà. Je refusais systématiquement de jouer au foot, à l'école ou dans la rue. On me disait : « Ah, la fille ! » ou bien : « Tiens, il est malade », tellement l'idée d'anormalité est solidement solidaire de la non-footballité.
Je vous emmerde. Je n'ai jamais été malade. Quant à la féminité que vous subodoriez, elle est toujours en moi. Et me pousse aux temps chauds à rechercher la compagnie des femmes. Y compris celle des vôtres que je ne rechigne pas à culbuter quand vous vibrez aux stades.
Pouf, pouf.
Pierre DESPROGES
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